Une approche inhabituelle « neuroscientifique »
du phénomène religieux.
Michel THYS (17 février 2014).
Introduction.
Sans vouloir simplifier ou réduire l’infinie complexité du psychisme humain, en particulier le phénomène religieux, à des « mécanismes » psycho-neuro-physio-génético-éducatifs et culturels, n’est-il pas légitime de compléter son approche traditionnelle (philosophique, métaphysique, historique, théologique, psychanalytique, anthropologique, sociologique …) en prenant en compte les découvertes des neurosciences, aussi balbutiantes soient-elles encore (et donc le plus souvent ignorées par la plupart des philosophes actuels ...) ?
Entendons-nous bien cependant : ni les neurosciences, ni les sciences humaines, dont la psychologie, ne prétendent évidemment démontrer l’inexistence de « Dieu », puisque, par définition, aucune inexistence n'est démontrable (sauf en mathématiques). Mais leurs observations confirment celles des sociologues, par exemple la très fréquente corrélation entre un milieu croyant unilatéral et la persistance de la foi.
N'est-il pas dès lors légitime que certains concluent (philosophiquement et jusqu'à preuve du contraire), à l'origine exclusivement psychologique, éducative et culturelle de la foi, à sa fréquente persistance neuronale et donc à l'existence seulement subjective, imaginaire et illusoire de Dieu ? Tout le reste, il est vrai, (les "Livres saints », la théologie, les exégèses, etc.) ne serait plus alors que « littérature ». Mais il va de soi que dans ce cas, la foi resterait toujours légitime et d'autant plus respectable à mes yeux, qu'elle aura été choisie après avoir eu connaissance des options non confessionnelles.
Passons sur les observations bien qu'instructives a contrario, de certains neurophysiologistes croyants, notamment canadiens, tels que Mario BEAUREGARD qui, financés par la très chrétienne Fondation Templeton, ont tenté de démontrer « scientifiquement » l'existence de Dieu (qu'ils présupposent donc par "pétition de principe"!) en recherchant dans le lobe temporal « l'antenne », qu'« Il » y aurait placée pour recevoir sa « Révélation » : en vain, bien évidemment ! En effet, du fait des interconnexions constantes et éminemment complexes entre le cerveau émotionnel et le cerveau rationnel (selon le schéma simplifié mais pédagogique de McLEAN), c'est évidemment tout le cerveau qui est concerné (cf SAVER & RABIN), même si l'émotionnel prédomine chez un croyant.
Homo religiosus ?
C'est sans doute en raison de sa faiblesse corporelle que l'homo sapiens s'est redressé il y a quelque 100.000 ans, et que la sélection naturelle, grâce l'acquisition du langage, a lentement hypertrophié son néo-cortex pré-frontal, le rendant alors capable il y a environ 50.000 ans d’imaginer d'abord des « esprits » (d'où l'animisme, le chamanisme, ...), puis un nouveau « mécanisme de défense » : le recours à des dieux protecteurs et anthropomorphes (plus tard à un seul), dont il tentait d’apaiser la colère, ou de gagner les faveurs, par des sacrifices. Cela a laissé des traces de nos jours ... !
Michel de PRACONTAL écrit d'ailleurs dans « L'imposture scientifique en dix leçons » (2005), page 141 : « La pensée magique n'a jamais disparu de nos cultures supposées modernes et rationnelles, probablement parce qu'il s'agit d'un mode de raisonnement inhérent à la condition humaine. La pensée dite rationnelle n'a rien de naturel, c'est une construction, une ascèse, un exercice qui demande un travail continuel. L'éternel « retour de l'irrationnel » n'est en fait que la manifestation récurrente d'une forme de pensée qui ne nous a jamais quittés ».
Dans « La religion est-elle innée ? », le professeur de psychologie Vassilis SAROGLOU de l'Université catholique de Louvain, évoque « l'existence de prédispositions génétiques à la religiosité ».
Il faut nuancer : comme tous les mammifères, l'être humain possède un cerveau reptilien, génétiquement « programmé » par l'évolution pour réagir aux dangers. Il y a donc bien chez lui une composante irrationnelle et atavique, une prédisposition ancestrale à la croyance, MAIS elle ne s'actualise qu'au sein d'un environnement croyant unilatéral, à la fois éducatif et culturel, qui la conforte et la renforce.
Toutes les religions l'ont bien compris en apportant depuis toujours des réponses immédiates et sécurisantes qui s'adressent évidemment au cerveau émotionnel. La preuve a contrario, c'est que les enfants de parents athées ne deviennent jamais croyants, sauf influences extérieues unilatérales. C'est flagrant notamment aux USA où la croyance, théiste ou déiste, est majoritaire (à plus de 90 %), essentiellement parce que les alternatives de l'humanisme laïque y sont totalement occultées par les religions.
Vassilis SAROGLOU reconnaît d'ailleurs qu'« à côté de cette part génétique, les influences éducatives précoces décident en grande partie de l'orientation religieuse ou athée d'un enfant ». Après l'âge de 30 ans, ce ne sont pas, comme il l'écrit, « les influences génétiques, tant sur la personnalité que sur la religiosité, qui se renforcent ». Au contraire, selon moi, ce qui se renforce, c'est la difficulté, voire l'impossibilité d'encore remettre en question ses certitudes religieuses, par crainte de se déstabiliser et de se « décrédibiliser ».
La soumission.
La soumission serait non seulement acquise mais génétique, comme l’avait pressenti Desmond MORRIS en 1968, dans « Le Singe Nu » (avec la notion de «dominant/dominé»), et comme l'estime Richard DAWKINS, pour qui, déjà du temps des premiers hominidés, le jeune enfant n’aurait jamais pu survivre si l’évolution n’avait pas pourvu son cerveau (tout à fait immature) de gènes le rendant totalement soumis à ses parents (et donc plus tard à un dieu … ?)
Toutes les religions sont donc fondées, à des degrés divers, sur la soumission à un dieu, à un prophète et à un livre « sacré », qui s'excluent les uns les autres. À cause de leur prétention à détenir chacune LA Vérité et LE Vrai dieu, les religions m’apparaissent donc comme à l’origine de toutes les intolérances et de la plupart des guerres. Hier comme aujourd’hui. L'Histoire confirme d'ailleurs abondamment la piètre aptitude des religions et des idéologies politiques à développer une conscience morale autonome et le respect de la dignité humaine. Elle témoigne au contraire de leur remarquable aptitude à inciter, dès l’enfance, à la soumission, quelle qu'elle soit. Je pense même que l'absence totale de respect de la vie humaine du nazisme et du stalinisme, notamment, n'est pas due à leur idéologie politique soi-disant athée, mais à la croyance religieuse initiale, aussi bien celle des « dominants » Hitler ou Staline, que celle des dominés qu'ils ont facilement endoctrinés, la soumission religieuse ayant constitué un terreau favorable à leur soumission idéologique et à leur croyance en une prétendue « supériorité aryenne ».
« Liberté religieuse » ?
Du fait de nos nombreux déterminismes (héréditaires, hormonaux, éducatifs, culturels, religieux, idéologiques, sociaux, politiques, etc...), notre orgueil dût-il en souffrir, nous sommes moins libres que nous ne le pensons. Henri LABORIT, l’avait bien compris dans « Eloge de la Fuite », page 59 :
« Je suis effrayé par les automatismes qu’il est possible de créer à son insu dans le système nerveux d’un enfant. Il lui faudra, dans sa vie d’adulte, une chance exceptionnelle pour s’évader de cette prison, s’il y parvient jamais ». Répondant à Jacques LANGUIRAND, à Radio Canada, il disait :« Vous n’êtes pas libre du milieu où vous êtes né, ni de tous les automatismes qu’on a introduits dans votre cerveau, et, finalement, c’est une illusion, la liberté ! ». Ou encore : « Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change » (dernière phrase du film, « Mon oncle d'Amérique » (1980), écrit par Alain RESNAIS.
La foi : un choix vraiment libre ?
Vassilis SAROGLOU écrit : « Le fait d'avoir la foi (...)n'est pas tellement, d'un point de vue statistique, une question de choix. C'est plutôt une question de continuité ou d'assimilation de tout le bagage mental ou affectif que l'on a reçu par le biais de la socialisation, qu'il s'agisse de croyance, de pratique, d'émotion ou de valeurs ».
Et pour cause : dans nos pays démocratiques, «la liberté constitutionnelle de conscience et de religion» me paraît plus théorique et symbolique qu’effective, parce que l’émergence de la liberté de croire ou de ne pas croire est généralement compromise, à des degrés divers. Elle l'est d’abord par l’imprégnation de l’éducation religieuse familiale précoce (le tout jeune enfant est déjà naturellement animiste), éducation forcément affective puisque fondée sur l’exemple et la confiance envers les parents (influence certes légitime mais unilatérale, identitaire et communautariste). Elle l'est ensuite par l’influence d’un milieu éducatif croyant occultant volontairement toute alternative humaniste, rationnelle, philosophiquement laïque et non aliénante. L’éducation coranique, exemple extrême, en témoigne hélas à 99,99 % : la soumission à tous points de vue y est en effet totale (cf. le très grand nombre de musulmanes voilées), comme dans les sectes, et à un degré moindre dans le judaïsme, le protestantisme évangélique, la religion orthodoxe, le catholicisme, le protestantisme libéral et le bouddhisme.
Origine psychologique, éducative et culturelle de la foi.
Déjà en 1966, le psychologue-chanoine Antoine VERGOTE, alors professeur à l’Université catholique de Louvain, avait constaté, dans « Psychologie religieuse », sans doute à son grand dam, qu’en l’absence d’éducation religieuse, la foi n’apparaît pas (les parents incroyants en témoignent a contrario), et que la religiosité à l’âge adulte en dépend (et donc l’aptitude à imaginer un « Père » protecteur, « agrandi, substitutif » et anthropomorphique, fût-il qualifié d'«authentique, épuré, Présence Opérante du Tout-Autre ». Ainsi, page 294 :
« La disponibilité religieuse de l’enfant ne prend forme qu’à la condition d’avoir été précocement éduquée. Toutes les observations l’ont confirmé : l’influence des parents est le facteur le plus décisif dans la formation des attitudes religieuses.(…) Les gestes et le langage religieux des parents, la célébration des fêtes religieuses marquent de façon indélébile les souvenirs d’enfance de nombreux adultes, et déterminent leurs sentiments d’appartenance religieuse. (…). L’extraordinaire permanence des attitudes religieuses, que de nombreuses enquêtes ont mis en lumière, s’explique certainement par l’influence prépondérante de l’éducation familiale.»(…).
Son successeur actuel, Vassilis SAROGLOU, le confirme : « Le fait d'avoir eu des parents religieux et d'avoir reçu une éducation religieuse est le facteur le plus important pour déterminer les probabilités d'être, de rester ou de redevenir soi-même croyant, que ce soit à l'adolescence ou ultérieurement à l'âge adulte ».
Interprétation « neurophysiologique ».
Comment expliquer la fréquente persistance de la sensibilité religieuse ou déiste ?
Les neurosciences tendent, me semble-t-il, à confirmer son imprégnation neuronale : des neurophysiologistes ont en effet constaté que si les hippocampes (centres de la mémoire explicite) sont encore immatures à l’âge de 2 ou 3 ans, les amygdales (du cerveau émotionnel), elles, sont déjà capables de stocker inconsciemment le souvenir d'événements à forte charge affective ou des souvenirs émotionnels tels que, par exemple, l'atmosphère « envoûtante » d'une église, les prières et autres comportements religieux des parents, voire leurs inquiétudes métaphysiques, sans doute reproduits via les neurones-miroirs du cortex pariétal inférieur.
Ces « traces » neuronales, appelées « engrammes », sont indélébiles, et se renforcent par plasticité neuronale, au fur et à mesure des expériences religieuses.
Les observations par IRM fonctionnelle et par tomographie à émission de positons suggèrent que le cerveau rationnel, le cortex préfrontal notamment, et donc aussi bien l’esprit critique que le libre arbitre ultérieurs s’en trouvent inconsciemment « éteints », et donc « anesthésiés », à des degrés divers, indépendamment de l’intelligence et de l’intellect, du moins en matière de foi.
Même André COMTE-SPONVILLE se dit « athée fidèle » à sa croyance enfantine, ou du moins aux « valeurs chrétiennes », telles que « l'amour du prochain ».
Cela expliquerait a fortiori la fréquente imperméabilité de certains croyants, notamment créationnistes, à toute argumentation rationnelle ou scientifique, et donc la difficulté, voire l’impossibilité de remettre leur foi en question (cf. le pasteur évangélique belge Philippe HUBINON à la RTBF : « S’il n’y a pas eu « Création », tout le reste s’écroule … ! ». Donc aussi « Dieu », les dogmes, etc …
Les conversions religieuses.
Dans cette optique, les conversions religieuses, mais aussi la « Révélation », me semblent explicables. Lorsqu’on bascule de l’incroyance vers la croyance, ou d’une forme de croyance à une autre, il se produit en un instant un bouleversement d’hormones et de neurotransmetteurs, un peu comme, mutatis mutandis, dans le cas du coup de foudre amoureux …
Je m’explique par exemple, la conversion de Paul CLAUDEL, ancien croyant, en entendant le Magnificat de BACH à N-D de Paris le 25 décembre1886. Malgré sa brillante intelligence, il ignorait forcément à cette époque que l’environnement sensoriel (les grandes orgues, l’odeur d’encens, le décorum, la génuflexion…) avait provoqué en lui un bouleversement psychophysiologique, au niveau notamment de la production de la phényléthylamine, de l’ocytocine, de la sérotonine et de la dopamine, au point de faire disjoncter son cerveau rationnel au profit de son cerveau émotionnel, ce qui lui a fait retrouver la foi. Ce n’est d’ailleurs pas surprenant puisque les sensibilités poétique, musicale, religieuse, …, y ont des « localisations » voisines, ce qui facilite les interactions.
Les exemples de « hapax existentiel » (Michel ONFRAY), c'est-à-dire de circonstances exceptionnelles laissant des traces physiologiques et psychologiques indélébiles, sont très nombreux : par exemple, la conversion du docteur Alexis CARREL, prix Nobel, qui avait perdu la foi pendant ses études, et qui l’a retrouvée lors d’un voyage à Lourdes, ou celle d’Eric-Emmanuel SCHMITT, à 29 ans, perdu sous le firmament glacial du Sahara (même lorsqu’on est issu comme lui d’une famille incroyante, l’influence inconsciente de deux mille ans de judéo-christianisme se réveille chez certains incroyants en danger de mort, notamment. Cf le « pari de Pascal ». Ce philosophe, lors de la « nuit du Mémorial » du 23 novembre 1654, connut aussi un état d'exaltation extrême et il nota sur un papier ses sensations, ses émotions, et les sentiments que lui inspirèrent ces minutes d'une telle densité. Le texte s'acheva sur ces mots : «Joie, joie, joie, pleurs de joie » : Pascal connut ce soir-là un authentique ébranlement physiologique dont il ressortira métamorphosé.
« La religion en miettes ».
Dans la plupart des pays européens intellectualisés, où les options non confessionnelles ont une chance d'être découvertes, la religiosité est en chute libre, d'abord parce qu’aucun dieu ne s’est jamais manifesté concrètement, mais aussi à cause de l'aspiration croissante à l'autonomie de la conscience, à la responsabilité individuelle et à la liberté de pensée. Certains cependant restent croyants, définitivement marqués par leur foi, ou déistes, définitivement déterministes et convaincus qu'il existe une « intelligence supérieure » qui a présidé à l' (apparente) harmonie de l'univers, à la prodigieuse variété des espèces animales et végétales, à l'extraordinaire complexité du vivant, du cerveau humain notamment, etc., et, ajouterai-je, parce qu'ils ne peuvent pas se représenter une durée aussi longue que des centaines de millions d'années et son influence sur l'évolution.
D'autres enfin se concoctent un amalgame de croyances ou de superstitions, telles que l'astrologie (cf « l'ouvrage « La religion en miettes » de la sociologue croyante Danielle HERVIEU-LEGER).
À moins évidemment de se faire harponner par les sectes, expertes en abus de faiblesse, en manipulation mentale, en dépersonnalisation et en captation de patrimoine ...
Du fait de la sécularisation et de la laïcisation croissantes, de plus en plus d’européens (et même quelques musulmans de chez nous) désertent donc les lieux de culte et tendent à privilégier l’autonomie de la conscience et la responsabilité individuelle, plutôt que la traditionnelle soumission religieuse.
Réaction des religions.
Les religions réagissent évidemment par des tentatives de re-confessionnalisation des consciences, de réinvestissement médiatique de l’espace public (surtout depuis Jean-Paul II) et de re-cléricalisation de la politique notamment européenne (via par exemple l’ « Opus Dei »), tandis que les sectes spéculent sur la quête de sens qui subsiste (cf. les évangélistes américains, les mormons, les scientologues, les créationnistes, etc.).
Plutôt qu’un « retour du religieux », j’y vois de nouvelles «stratégies» religieuses qui exploitent à la fois la vulnérabilité du psychisme humain, l'actuelle conception « laïque » de la « tolérance » et de la « neutralité », ainsi que le laxisme de certains politiciens électoralistes qui concèdent de plus en plus de revendications inspirées par des prescrits religieux, notamment par la charia. Bien que les musulmans, dans leur immense majorité, soient modérés et pacifiques, l'islamisation progresse dans toutes les grandes villes lorsque le coran, la sunna, les hadiths, la charia, etc. sont pris à la lettre ...
Vers quelques conclusions pédagogiques et politiques ?
Préventivement, tout dépendra bien sûr de l'éducation donnée. N'est-il pas grand temps de freiner, dès « l'école pour tous », le communautarisme croissant, source d'intolérance, d'incompréhension de l'autre et de non acceptation de sa différence (tant qu'elle n'est pas terroriste !), et de viser concrètement un meilleur vivre ensemble ?
Le remplacement des cours de religion ET de morale laïque par un cours commun de philosophie, rassemblant enfin tous les enfants et adolescents, irait dans ce sens, mais tant que la liberté constitutionnelle permettra inconditionnellement la liberté d'enseignement (même islamique et donc dogmatique...) sans proposer d'alternatives et sans imposer des limites, l'école confessionnelle, notamment catholique, persistera dans son « projet pédagogique » évangélisateur, fût-il lénifié de nos jours ...
Pourtant, par simple honnêteté intellectuelle, chacun devrait pouvoir choisir, en connaissance de cause, aussi librement et tardivement que possible, ses convictions philosophiques (OU religieuses, puisque, je le répète, le droit de croire restera toujours légitime et respectable, a fortiori si cette option a été choisie plutôt qu’imposée). Mais pour que les libertés de conscience et de religion, en particulier celle de croire ou de ne pas croire, deviennent plus effectives que symboliques, il faudrait, me semble-t-il, s’orienter enfin et dès que possible, politiquement et économiquement, vers la fusion des réseaux officiel et privé (dit « libre » en Belgique !).
Cela impliquerait un système éducatif « pluraliste » qui proposerait notamment, à tous et partout, une information minimale, progressive, objective et non prosélyte à la fois sur les différentes options religieuses (ce qui ferait apparaître tôt ou tard leur point commun, à des degrés divers, évidemment occulté : la soumission à un dieu et à un texte « sacré »), ET sur les options laïques évidemment encore plus occultées : l’humanisme laïque, la spiritualité laïque, la morale laïque, etc.(qui incitent au libre-examen, à l'esprit critique à tous égards, à l'autonomie de la conscience, à la responsabilité individuelle, au respect et à l'acceptation de l'autre.). Cela compenserait les influences religieuses familiales, certes légitimes mais unilatérales et communautaristes, ainsi que les inégalités socioculturelles résultant notamment de l'immigration.
Enfin, cela permettrait de rechercher des valeurs communes, « universalisables », parce que bénéfiques à tous et partout, telles que le respect de la dignité de l’homme, de le femme et de l’enfant, la liberté de pensée, de conscience et de religion, etc...
La religion est en effet une affaire privée qui n’a plus sa place à l’école, sauf lors d’un cours d’histoire ou de philosophie, parce qu’un minimum de culture religieuse, notamment artistique, fait partie de la culture générale. Dans cette optique, l’enseignement confessionnel, à quelque niveau que ce soit, m’apparaît comme élitiste, inégalitaire, prosélyte, exclusif, intolérant, obsolète et donc inadapté à notre époque de pluralisme des cultures et des convictions.
L’avènement d’une citoyenneté responsable, respectueuse de tous, me paraît à ce prix. Mais il faudra d'abord repenser les notions de «neutralité» de l’Etat et de «libre choix» des parents, lequel, quoi qu'ils en pensent, n’est pas prioritaire par rapport à « l’intérêt supérieur de l’enfant ».
Dans une ou deux générations, peut-être, lorsqu'on aura enfin compris, confirmé, diffusé et admis que la foi a une origine exclusivement éducative psychologique et culturelle et que les religions imprègnent malhonnêtement le cerveau émotionnel pour maintenir (autant que possible) leur mainmise sur les consciences.
Mais ce n'est là que mon point de vue d'athée, dont je ne prétends évidemment pas qu'il soit plus pertinent qu'un autre. Merci donc pour vos commentaires.
Cordialement,
Michel THYS à Ittre (Belgique).
michel.thys357@gmail.com
http://michel.thys.over-blog.org
Quelques références bibliographiques :
- Le Grand Larousse du cerveau (2010).
-Dictionnaire de Psychologie et psychopathologie des religions (2013) Gumpper & Rausky.
- Nadia GEERTS : « La neutralité n'est pas neutre ». La Muette 2012.
- André COMTE-SPONVILLE : « L'esprit de l'athéisme ». Albin Michel 2006.
- Baudouin DECHARNEUX : La religion existe-t-elle ? » (Essai sur une idée prétendument universelle). Ed. L'Académie en poche, 2012.
- Patrick JEAN-BAPTISTE « La biologie de dieu » 2003 Agnès Viénot 2003.
- Richard DAWKINS : « Pour en finir avec dieu », R. Laffont 2008.
- Marcel BOLLE de BAL & Vincent HANSSENS : »Le croyant et le mécréant ». Ed.Mols 2008.
- Sigmund FREUD : « L'avenir d'une illusion » PUF 1948.
- Antoine VERGOTE, chanoine, « Psychologie religieuse », du, Ed. Dessart 1966.
professeur émérite à l’Université catholique de Louvain.1966.
- Vassilis SAROGLOU (son successeur) & HUTSEBAUT, D :
Religion et développement humain »,. 2001.
- Vassilis SAROGLOU, dans Cerveau et Psycho n° 40 : « La religion est-elle innée ? ».
- Jean-Didier VINCENT : « Voyage extraordinaire au centre du cerveau » Odile Jacob 2007, et avec Jules FERRY : « Qu'est-ce que l'homme ? »Odile Jacob, août 2001.
- V.S. RAMACHANDRAN « Le fantôme intérieur ». Odile Jacob 2002.
- Jean-Pierre CHANGEUX « L’homme neuronal »1993, « L’homme de vérité » 1994
- Pascal BOYER « Et l’homme créa les dieux ».
- Antonio DAMASIO « L’erreur de Descartes »2001 et « Spinoza avait raison ».
- Henri LABORIT « Une vie » 1996 « Derniers entretiens », « Eloge de la fuite » Laffont 1976,« Dieu ne joue pas aux dés ». Grasset 1987.
- Mario BEAUREGARD « Du cerveau à Dieu » « The spiritual brain ».
- Michaël PERSINGER « On the possibility of directly accessing every human brain
by electromagnetic induction of fundamental algorythms ».1995.
- Paul D. MacLEAN « Les trois cerveaux de l’homme » 1990.
- Joseph LEDOUX « Emotion, mémoire et cerveau » 1994.
- John SAVER & John RABIN « The neural substrates of religion experience » 1997.
- Francis CRICK « Une vie à découvrir »
- Michel ONFRAY : « Athéologie ».
- Danielle HERVIEU-LEGER : « La religion en miettes ou la question des sectes ». Calman-Lévy 2001. ,
- Noël RIXHON, ancien prêtre athée : « L'absence d'être de Dieu ». (Soc. des Ecrivains 2006), « Conscience athée », « Le curé Meslier : Dieu n'est pas ».
- Gabriel RINGLET, ancien vice et pro-recteur de l'UCL,, : « L'évangile d'un libre-penseur ».
- Michel de PRACONTAL : « L'imposture scientifique en dix leçons » Ed. Du Seuil 2005. - Via Internet : « Le cerveau à tous les niveaux ». etc.